Le CSNE, un investissement au service du développement ?
Investir dans une infrastructure créerait de l’activité économique comme un effet mécanique.
Manuel Valls à l’Assemblée nationale le 1er octobre 2014 : « Je pense aussi, et surtout, à la préparation de l’avenir : les investissements d’aujourd’hui, qui permettent d’améliorer la qualité de vie, l’attractivité économique et l’emploi, font aussi la réussite de demain. Le gouvernement est donc déterminé à relancer l’investissement dans le pays. ».
MAIS QUEL DEVELOPPEMENT ?
1.) L’import/export des céréales et la filière agro-industrielle :
Le développement massif correspond aux attentes de la filière céréalière. Avec une forte capacité de stockage en silos, elle peut répondre aux commandes en fonction des cours mondiaux. Un canal à grand gabarit répond parfaitement à cette demande. C’est ce que souligne le rapport Pauvros :
Cette économie est très capitalistique et peu dense en emplois. On ne peut que s’interroger sur le rapport entre le prix d’un tel équipement public et les profits privés réalisés à l’exportation pour la filière céréalière, par ailleurs déjà subventionnée.
La filière des engrais, l’importation massive de bois pour faire de l’énergie, sont par ailleurs présentées comme des filières importantes pour le futur canal à grand gabarit.
Nous sommes bien loin d’une économie territoriale et durable.
2.) Le prélèvement de granulats :
Les granulats pour le bassin parisien sont principalement acheminés par la vallée de la Seine et leur estimation pour le projet CSNE a été fortement questionnée. Leur acheminement par la vallée de l’Oise répond à une demande des carriers des vallées alluvionnaires dans l’Aisne et dans l’Oise.
Par-delà cette possible surévaluation des besoins, c’est également une orientation contradictoire avec le principe même de l’économie circulaire. Alors même que 300 millions de tonnes de déchets inertes du bâtiment sont jetés comme déchets, on continue à extraire 400 millions de tonnes des carrières en France chaque année.
3.) Le CSNE est l’hinterland du port de Rotterdam. Il trouve son sens dans une économie globalisée qui détruit les emplois en France et en Europe :
Le Havre, Dunkerque, Calais voire Boulogne sont régulièrement cités comme des ports devant bénéficier du CSNE, ce qui est un déni de réalité.
Le CSNE constitue le prolongement du port de Rotterdam qui a l’ambition d’être la porte d’entrée portuaire de l’Europe. Il est déjà en tête des ports européens et de nouveaux investissements augmentent actuellement sa taille sur la mer.
Comme l’objet du CSNE est de connecter les ports belges et néerlandais au bassin parisien, il est manifeste que le port du Havre à tout à perdre à la réalisation d’un tel équipement.
Au contraire d’une organisation plus combinée des transports rationnalisant les trajets, la réalisation du CSNE dessine une entrée massive des produits d’importation par Rotterdam avec plusieurs conséquences :
- un circuit de transport absurde : les marchandises passant dans la Manche au large des ports français pour gagner Rotterdam ou Anvers, pour redescendre ensuite par la terre à 100 km du littoral.
- une préemption prévisible de la flotte fluviale néerlandaise, bien mieux équipée et organisée que la flotte fluviale française dominée par une organisation artisanale.
- une zone de logistique et de transformation située près des ports d’arrivée, ce qui explique notamment que le déficit commercial de la France est si important à l’égard de la Belgique.
Le CSNE s’intègre dans un modèle de développement globalisé, dont les conséquences pour notre économie sont délétères.
Il n’est en rien un outil de développement territorial qui créerait « comme par magie » un développement des territoires traversés, sauf pour quelques denrées particulières (céréales) qui seront exportées, mais pour le bénéfice de combien de personnes ?